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EXERCICE DE LA PROFESSION
CONGRES DE LA CNA : L’AVOCAT TRAVERSE LE TEMPS
MALTE - 30 septembre/1er octobre 2005
Publié le mardi 25 octobre 2005
Par Guillaume le Foyer de Costil
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Il est rare que la CONFEDERATION NATIONALE DES AVOCATS r�unisse son congr�s annuel en terre non francophone. C’est une bonne nouvelle, c’est le signe qu’elle entend vivre pleinement sa mission dans l’espace mondial ; l’essentiel est que nous soyons aujourd’hui en Europe, continent aujourd’hui apais� o� l’int�r�t g�n�ral affronte loyalement l’individu dans un ordre juridique visible, pr�visible et �volutif.

Je remercie les autorit�s maltaises de l’accueil qui a �t� r�serv� � la C.N.A. ; je les f�licite pour la fa�on dont ce pays magnifique est men� vers la prosp�rit� et le bonheur ; je me r�jouis que nous puissions y confronter nos exp�riences ;

Pour autant, la C.N.A. n’oublie pas qu’elle est un syndicat d’avocats et qu’elle doit, � ce titre, d�fendre des int�r�ts particuliers dans le respect de ceux de la collectivit� ; La CNA doit, � cette occasion, dire publiquement aux autorit�s fran�aises, ici officiellement repr�sent�es, un certain nombre de v�rit�s, dans le respect du contradictoire, auxquelles seront, bien s�r, apport�es des r�ponses, mais qui ne la satisferont pas n�cessairement.

Le th�me de notre Congr�s : « l’avocat traverse le temps », a pu para�tre � certains myst�rieux, voire �sot�rique.

Il ne s’agit pas de faire faire � l’avocat un voyage dans le temps. On peut ais�ment constater qu’il l’a fait tout seul ; au travers de l’�volution de notre profession, pass�e, pr�sente et � venir, des valeurs essentielles, et peut-�tre m�me des principes, se sont d�gag�s au point d’�tre consacr�s par des textes � valeur europ�enne.

De ce constat d�coule le souhait, malgr� les �volutions et en d�pit des tentations, de pr�server ces acquis pour parvenir � un « id�al professionnel » qui nous mette en mesure d’exercer notre m�tier dans des conditions qui nous satisfassent et qui servent l’int�r�t g�n�ral.

Nos inqui�tudes concernent essentiellement nos libert�s, que nous consid�rons comme menac�es dans des domaines aussi inattendus que la proc�dure civile.

Nos projets sont nombreux ; nous les avons exprim�s dans la plate-forme que va soutenir la liste de la C.N.A. lors des �lections au Conseil National des Barreaux Permettez-moi de vous les exposer succinctement dans le temps volontairement r�duit que je me suis moi-m�me imparti.

NOS LIBERTES MENACEES

Les Services de la Chancellerie nous r�servent toujours un accueil agr�able et chaleureux, Monsieur le Directeur, et nous n’avons certainement pas � nous plaindre des rapports que nous entretenons avec vous.

Il y a quelques jours le Garde des Sceaux a bien voulu recevoir une d�l�gation de notre bureau ; nous gardons tous le souvenir d’une rencontre franche et cordiale au cours de laquelle tout a pu �tre dit.

Nous ne pouvons pas en dire autant de l’accueil que nous r�servent habituellement vos coll�gues des juridictions, d’abord en qualit� d’avocats, mais aussi lorsque � notre corps d�fendant ils nous transforment en justiciables.

Nous constatons g�n�ralement que les magistrats fran�ais ont une mauvaise opinion des avocats, qu’ils les consid�rent comme des g�neurs et quelque fois comme des professionnels incomp�tents et arrogants. Quoi qu’il en soit, ils s’en m�fient.

Je me suis demand� si nous ne devions pas consid�rer cela comme une r�ussite, puisqu’une partie de notre travail consiste � compliquer l’existence des magistrats (c’est notre mission l�gale puisque nous les saisissons de proc�s qu’ils se passeraient tout � fait de juger et que nous soulevons des exceptions de proc�dure qui parfois les concernent directement, lorsqu’ils sont au Parquet).

Je suis pourtant convaincu qu’il ne devait pas en �tre ainsi et que l’�tat d’esprit qui r�gne actuellement entre nos deux professions est le r�sultat de la formation s�par�e des jeunes professionnels ; je ne suis pas le premier � le dire : il r�gne, dans nos �coles, un �tat d’esprit d’hostilit� r�ciproque ; nous en recueillons les fruits amers dans nos vies professionnelles.

Cela ne doit pas durer ; au surplus le fait que le Ministre de la Justice ainsi que celui de l’Int�rieur soient nos confr�res dans le civil, ne doit pas constituer une circonstance aggravante de cet �tat, bien au contraire.

Les avocats s’�l�veront toujours contre l’obligation qu’il leur est faite de d�noncer certains de leurs clients au motif de la lutte contre le blanchiment, ils protesteront de fa�on incessante contre l’interdiction qui semble devoir leur �tre faite, de plus en plus durement, de r�conforter les familles de leurs clients en leur donnant les indications minimales sur la gravit� des faits qui sont imput�s � leurs enfants, ils s’indigneront toujours qu’on leur interdise, comme peuvent le faire certains de leurs confr�res de pays civilis�s, de rechercher activement les preuves susceptibles d’aider � la d�fense des justiciables poursuivis.

Jamais nous n’accepterons que le secret professionnel, qui nous unit visc�ralement � nos clients, puisse se trouver viol� par des �coutes t�l�phoniques ou d’autres moyens techniques inspir�s par les derni�res r�formes de proc�dure p�nale qu’a promulgu� un Gouvernement tout de m�me un peu d�magogue, en s’appuyant sur l’inqui�tude des m�res de famille, et l’annonce p�riodique d’attentats hypoth�tiques et de menaces terroristes qui ne p�sent pas r�ellement sur notre pays.

Il est vrai que le indications r�cemment donn�es par la Chancellerie au groupe de travail tripartite sont rassurantes ; Mais quels efforts pour parvenir � cette timide avanc�e ; et encore ne s’agit-il que de l’annonce d’un projet de loi ; que d’obstacles � franchir encore.

Mais les Fran�ais aiment se faire peur et se contr�ler mutuellement, m�me les magistrats veulent maintenant mesurer leurs performances respectives, c’est dire ...

Dans un domaine beaucoup plus technique, la C.N.A. ne peut que s’inqui�ter des r�formes de proc�dure civile qui semblent en cours de r�alisation et qui tendent � la suppression, de facto, du double degr� de juridiction, de la plaidoirie et, en r�alit�, � l’appropriation par le juge du proc�s civil, autrefois « chose des parties ».

Je dois dire que je ne comprends pas cet app�tit de pouvoir dans un domaine qui ne met pas en jeu l’ordre public et ob�it � une logique de performance qui fait fi de la psychologie judiciaire.

La proc�dure, c’est comme les autoroutes, plus on en construit plus y a de circulation.

Tous les projets �tatiques importants sont accompagn�s d’�tudes d’impact ; je ne suis pas s�r qu’il en a �t� ainsi en ce qui concerne ces r�formes proc�durales. Sachez en tout cas, Monsieur le Directeur, qu’en l’�tat des textes propos�s, elles ne nous satisfont pas.

D’autres �volutions nous inqui�tent et qui ressortissent � un �chelon l�galement sup�rieur en ce qui concerne la lib�ralisation des services.

La C.N.A. doit-elle remercier le Gouvernement d’avoir organis� un r�f�rendum au mois de mai qui a mis en �vidence ce qu’elle d�non�ait depuis de nombreuses ann�es ? Ce n’est pas s�r ; toujours est-il qu’� l’heure o� nous parlons, l’avocat fran�ais doit encore beaucoup au plombier polonais, gr�ce � qui la directive services est repartie � l’�tude.

Mais si la Commission Europ�enne n’a pas dit son dernier mot, la profession d’avocat non plus.

UN BARREAU DE NOTRE TEMPS

Dans le domaine des �volutions conceptuelles, il en est une que la C.N.A. refuse �galement : c’est le rapprochement avec les juristes d’entreprise.

Nous nous voyons tous les 15 jours, Monsieur le Directeur, � la Direction des Affaires Civiles, autour d’une table, o� se discutent les modalit�s qui pourraient �tre celles d’un �ventuel rapprochement avec ces professionnels.

Etude approfondie, syst�matique, int�ressante et m�thodique des cons�quences d’un tel rapprochement mais qui nous en montre chaque fois les dangers et, pour tout dire, l’absence totale d’int�r�t pour la profession d’avocat.

Je sais qu’� l’heure o� je parle, un autre congr�s se tient � LYON, organis� par un syndicat, pour lequel la C.N.A. a le plus grand respect.

Le th�me en est « avocat d’entreprise et juriste interne : les cl�s d’une coop�ration r�ussie ».

Le sujet est, semble-t-il, propice aux jeux de mots, les juristes d’entreprise sont tout � la fois devenus internes et avocats d’entreprise.

La v�rit� est que la profession ne veut pas de cette r�forme, sous quelque modalit� que ce soit, ce que montreront, certainement, les �lections pour le C.N.B. du mois de novembre prochain. Elle la refuse parce que son aboutissement serait de nature � parachever le processus de diminution des libert�s de l’avocat, garant des libert�s.

Pouvons-nous s�rieusement avoir un employeur et rester nous-m�mes ?

Avons-nous la moindre chance que subsiste l’�tat d’esprit ind�pendant des professionnels lib�raux, qui garantissent la fluidit� du corps social, si nous empilons la discipline des cabinets anglo-saxons, les r�glements int�rieurs des soci�t�s multinationales et les perspectives de carri�re que les meilleurs d’entre nous vont former dans ce nouvel univers ?

Pensez-vous que les magistrats, qui nous consid�rent d�j� si mal, conserveront pour nous le moindre respect s’ils savent que nous sommes les salari�s de leurs justiciables ?

L’action de la C.N.A. b�n�ficie d’un important soutien dans l’opinion des professionnels.

Ce projet ne doit pas voir le jour.

Enfin, la C.N.A. a un certain nombre de suggestions � vous faire. Dans le domaine fiscal d’abord, elle demande instamment et � nouveau, pour respecter l’�galit� des armes dans le domaine des conflits de droit social, mais aussi pour aider nos citoyens � faire valoir leurs droits, d’�tendre la d�ductibilit� fiscale des honoraires d’avocat aux particuliers, ou en tout cas de leur appliquer un taux minor� comme pour les travaux de construction.

Les sommes en jeu ne sont pas consid�rables et la m�thode peut �tre soit celle de la baisse du taux de la TVA ou, plus facilement, celle de l’instauration d’un cr�dit d’imp�t ; les masses financi�res en jeu sont relativement peu importantes au regard de celles du domaine de la sant� et le Gouvernement pourrait facilement faire un effort.

S’il est un domaine dans lequel le Gouvernement pourrait aussi intervenir lorsqu’il met en jeu la libre concurrence, c’est celui de l’�quilibre des rapports entre les avocats, d’une part, et les prescripteurs institutionnels d’autre part (compagnies d’assurance, soci�t�s de protection juridique, etc....) qui tiennent les avocats dans un �tat d’asservissement complet parce qu’ils sont dans une position dominante et qu’ils en abusent.

La tarification de fait des honoraires au plus bas niveau par ce secteur de l’�conomie est un v�ritable scandale et les efforts individuels ou ceux des instances professionnelles se sont heurt�s � des pressions inadmissibles s’exer�ant sur les responsables professionnels syndicaux et ordinaux eux-m�mes.

Je suis s�r que le Gouvernement, le Minist�re de l’�conomie et des Finances et la Direction de la Concurrence en particulier, peuvent faire quelque chose. Nous n’y arriverons pas sans leur aide.

Voil� pourquoi nous sommes ici r�unis.

Je voudrais �voquer ici, non sans �motion, le souvenir de l’Assembl�e G�n�rale Constitutive de « l’Association Nationale des Avocats inscrits aux Barreaux de France, des Colonies et Pays de Protectorat » qui se tint � LYON en 1921 et dont la C.N.A. est directement issue.

Et je conclurai, comme le fit son Comit� Provisoire :

« Dans notre Association, il y a place pour tous. Chacun de nous doit s’y sentir � l’aise, pourvu qu’il aime sa profession, qu’il s’en fasse une id�e haute et noble et ne s�pare jamais le soin de ses int�r�ts du souci du bien public.

« Ce sentiment nous permettra de contribuer � r�aliser, dans une pens�e de concorde et de tol�rance mutuelle et en m�me temps d’esprit d’initiative, les r�formes dont l’exp�rience a �tabli la n�cessit� et dont la mise en pratique assurera � notre �uvre une plus large part de l’�uvre toujours renouvel�e de la justice ».

C’est ainsi que l’avocat traverse le temps.

Je vous remercie de votre attention.

Auteur
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Guillaume le Foyer de Costil
Avocat au barreau de Paris
Post-Scriptum

lien vers le site de la CNA www.cna-avocats.com

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