Chers Amis,
Il semble que les urnes aient d�cid� pour moi d’un sort favorable, il m’appartient d�s lors de vous remercier.
Mes remerciements iront en premier lieu � mes 37 pr�d�cesseurs, ils sont trop nombreux pour que je les �num�re mais leurs figures majestueuses ont su donner � la fonction que vous m’avez confi�e un lustre et un prestige exceptionnel que j’essaierai de lui conserver.
Je me suis longtemps cach� derri�re leurs carrures puissantes et leur d�termination ; je suis aujourd’hui seul devant vous, seul devant le monde ; enfin pas si seul, puisque que vous �tes tous l�.
Mes remerciements iront ensuite � ceux qui ont accept� de continuer avec moi cette aventure, la plupart d’entre vous en font partie ; je les remercie de l’abn�gation, du d�vouement, de la disponibilit�, de la comp�tence, de l’intelligence et de l’amiti� dont je sais � l’avance qu’ils feront preuve durant les deux ans de mon mandat ; le d�fi qui m’est lanc� est de vous retenir pr�s de moi.
Dans deux ans, je me demanderai : " Qu’as-tu fait de ces talents ?
Ce soir, je vous propose trois r�flexions.
La premi�re a trait � la finalit� de notre action syndicale.
J’ai eu l’occasion de m’exprimer par �crit sur ce point, il importe que je pr�cise aujourd’hui ma pens�e.
La deuxi�me est relative aux moyens qu’il m’appara�t n�cessaire de mettre en �uvre pour que notre action soit efficace.
La troisi�me enfin consiste � vous proposer un certain nombre de sujets sur lesquels il m’appara�t n�cessaire que nous travaillions durant ces deux ann�es ; d’autres s’y ajouteront �videmment en cours de route, seule l’actualit� commande.
1 - A quoi sert un syndicat ?
Nos statuts nous le disent clairement, des juges nous l’ont rappel� il n’y a pas si longtemps � l’occasion d’une affaire m�diatique : un syndicat est l� pour d�fendre les int�r�ts de ses membres, pass�s, pr�sents et futurs c’est � dire les avocats fran�ais.
Et m�me si les libert�s nous tiennent � c�ur, m�me si l’ordre moral qu’un gouvernement trop z�l� tente d’�tablir nous p�se chaque jour, nous ne devons jamais oublier que notre existence est attach�e � la d�fense farouche et partiale d’int�r�ts cat�goriels.
Ce moteur de notre action doit �tre visible, et en permanence, l’int�r�t g�n�ral a d’autres serviteurs.
Cette caract�ristique doit nous distinguer de fa�on tr�s nette d’autres organismes de notre profession, que chacun reconna�tra, auxquels chacun d’entre nous a appartenu, appartient ou appartiendra, y emportant, coll� � la semelle de ses chaussures, son r�flexe syndicaliste.
C’est pr�cis�ment l� que le b�t blesse, que la concurrence se fait parfois d�loyale et que les difficult�s commencent.
Ce n’est pas ici le lieu de dire combien le taux de syndicalisation de notre profession est bas et combien il faut le d�plorer.
J’ai eu maintes fois l’occasion de le dire, les causes de cette d�saffection sont trop �videntes : elles r�sident dans une confusion des genres qui semble tr�s difficile � �viter.
Lorsqu’une institution de r�gulation aussi prestigieuse que l’Ordre des Avocats au Barreau de Paris intervient aupr�s du Gouvernement pour obtenir que le statut des Avocats soit am�lior�, comment l’en bl�mer ?
Lorsque le Conseil National des Barreaux, dans une assembl�e g�n�rale en forme de grand-messe, pr�sente au Gouvernement les revendications l�gitimes de la profession, comment protester ?
Mais alors que nous reste-t-il � faire ?
A quoi servons-nous ?
J’ai peut-�tre la r�ponse.
Les syndicats d’avocats sont d’abord des voies d’acc�s � la chose publique.
Elles permettent � chacun des membres de chacun des Barreaux d’y go�ter et parfois d’appr�cier cette d�marche altruiste.
Elles nous donnent le go�t du d�sint�ressement, qui est apr�s tout l’un de nos principes essentiels,
Cependant il nous faut y �tre initi�s : c’est pourquoi chacun d’entre nous ici pr�sents doit �tre un initiateur.
Je me rappelle encore l’appel t�l�phonique de Jean-Michel BRAUNSCHWEIG en 1990, me demandant de me pr�senter � une myst�rieuse �lection d’un myst�rieux organisme appel� " Comit� Directeur " d’une institution �trange appel�e alors CSA, dont j’ignorais jusqu’� l’existence.
Je n’ai toujours pas compris pourquoi j’ai accept�, mais je ne le regrette pas ; ce jour l�, ma vie a chang�.
Les syndicats sont aussi des lieux de rencontre : ceux o� les B�tonniers de la Manche ou du Cantal peuvent d�jeuner sur la Canebi�re avec des Confr�res de Mulhouse ;
Qui d’autre qu’un syndicat pouvait oser, Cher Jean COTESSAT, organiser une s�rie de colloques sur les relations du vin et du droit ?
Mais ce n’est pas tout : les Ordres et le Conseil National des Barreaux ne nous ont pas tout pris : ils nous ont laiss� notre �me, notre dynamisme est intact, notre puissance de travail reste compl�te, le Gouvernement continue de nous parler et de nous d�l�guer ses Ministres.
Apr�s tout, le scrutin de liste de notre Conseil National, les investitures syndicales aux �lections ordinales dans les grands Barreaux les �lections � la CNBF ou dans les organismes dits " techniques " sont autant de d�fis dans lesquels s’affirme notre identit� et par laquelle se justifie notre existence.
Lorsque le Conseil National des Barreaux annonce fi�rement qu’il s’est prononc� sans d�bat dans la profession pour la fusion des Conseils en propri�t� industrielle et des Avocats, voil� une occasion de protester ! Lorsque l’Ordre des Avocats au Barreau de Paris envisage favorablement l’int�gration des juristes d’entreprises dans notre profession, quelle aubaine pour notre force de contestation !
La CNA est le syndicat de tous les Avocats, il suffit de s’y inscrire, de payer sa cotisation, et de commencer � r�fl�chir avec ses commissions ;
Il n’y a pas de grades, il n’y a pas de proc�dure d’admission, pour y entrer il suffit de justifier d’une vertu : l’enthousiasme.
Mais tous ces v�ux ne doivent pas rester l’expression ang�lique de ma pens�e.
Il ne suffit pas de vouloir, il faut pouvoir.
Et pouvoir c’est �videmment disposer de moyens.
2 - Les moyens de l’action syndicale :
Etrange alchimie que celle du succ�s syndical.
Pour r�ussir, il faut malheureusement de l’argent ; j’ai �t� votre tr�sorier durant deux ans ; je puis vous assurer qu’il en faut beaucoup ; ce n’est qu’avec cet argent que l’on peut se procurer : du personnel comp�tent et d�vou�, des bureaux, de l’informatique, de la m�canographie, des frais d’envoi de routage de nos publications, des voyages et des d�placements, et beaucoup d’autres choses encore, tout cela co�te cher.
Pour avoir de l’argent, il faut des cotisations, des annonceurs, des subventions ; mais pour avoir des cotisations, des annonceurs ou des subventions, il faut qu’il y ait beaucoup d’adh�rents ou au moins beaucoup de sympathisants, beaucoup de visiteurs � ce Salon et de participants � nos congr�s, beaucoup de lecteurs pour le Barreau de France, beaucoup de consultations de notre site Internet, c’est l’histoire de l’�uf et de la poule.
Il semble que la poule existe encore, garderons-nous longtemps l’�uf ?
C’est �videmment mon principal projet.
La poule, ce sont les membres de la CNA, en tout cas les plus actifs d’entre eux ; c’est � dire tous ceux que j’ai en face de moi ce soir.
Mon projet est de vous garder tous pr�s de moi, de continuer � travailler avec vous pour que cette masse critique en de�� de laquelle un syndicat dispara�t, se d�veloppe au point de transformer notre mouvement d’�lite en un mouvement de masse.
La premi�re des pr�cautions que je dois prendre pour parvenir � ce but est de pr�server le plus pr�cieux de vos biens : votre temps.
C’est pourquoi je m’engage � ne vous d�ranger, � ne vous faire venir, � ne vous faire travailler que dans des conditions d’organisation tr�s rigoureuses, vous permettant de pr�voir, de g�rer et d’utiliser au mieux les disponibilit�s que vous voulez bien mettre � la disposition de la collectivit�.
Je serai exact aux rendez-vous que je vous fixerai, (je vous demande de l’�tre aussi) les r�unions que nous tiendrons seront courtes mais denses, elles seront pr�vues tr�s � l’avance pour vous permettre d’organiser vos d�placements, elles seront coordonn�es avec celles des autres organismes de la profession, elles ne seront pas annul�es au dernier moment et ne dureront pas plus que le temps pr�vu.
Ce temps, que vous voulez bien nous donner, je vous demanderai de l’utiliser avec �nergie sur nos projets, qui seront clairement identifi�s, et sur lesquels la r�flexion se fera de fa�on extr�mement d�mocratique, collective et pluridisciplinaire, pour que la minorit� ne s’incline devant la majorit� qu’avec le sentiment d’avoir fait valoir tous ses arguments et tous ses moyens.
Pour travailler en commun, il faut communiquer, cette communication n’est pas n�cessairement directe et verbale.
Internet existe, je l’utilise de fa�on fr�quente et m�me parfois abusive, je souhaite que nous puissions ensemble travailler avec ce moyen, que ce soit par le truchement de notre nouveau site, auquel sera �videmment int�gr�e l’ANASED, qui fait d�faut � la version actuelle, ou par e-mails. Je crois que la plupart d’entre vous se sont mis � ce moyen de transmission un peu barbare, mais si commode et si �conomique que nous ne pourrons bient�t plus nous en passer.
Je demanderai � notre secr�tariat d’identifier ceux d’entre vous qui ne voudront pas utiliser ce moyen qui sera le mode de communication par d�faut.
Je vous communiquerai dans les prochains jours, n’ayant pu l’�tablir d�finitivement aujourd’hui compte tenu de certaines incertitudes �lectorales, la composition de notre bureau, que, je l’esp�re, vous approuverez lors de notre prochain Comit� Directeur.
L’organigramme sera tr�s simple, simplement conforme � nos statuts ; il ne sert � rien de cr�er des commissions et des cellules de r�flexion si celles-ci ne fonctionnent pas v�ritablement.
Enfin, je me suis assur�, avant d’accepter ces fonctions de ce que les collaborations pr�cieuses des deux salari�es de notre syndicat continueraient � �tre � notre disposition durant mon mandat ; j’ai obtenu des assurances � ce sujet et je remercie vivement nos collaboratrices.
Jacqueline PATOU est la m�moire de la CNA ; je vais lui demander d’�crire les siennes pour tout savoir, mais je ne sais pas si elle en aura le temps.
Mais ces moyens devront avoir une fin ; je vous la propose sachant tr�s bien que je ne pourrai venir � bout de l’ensemble des questions qui nous pr�occupent.
Au moins, comme mes pr�d�cesseurs et notamment Jean de CESSEAU � qui je succ�de et dont je salue l’action enthousiaste et multiforme, j’aurais apport� ma pierre � l’�difice.
3 - Les projets de la CNA :
Ils sont nombreux.
Nous avons beaucoup de questions sur lesquelles, que nous soyons ou non consult�s, nous devons donner notre avis ; il y a aussi celles auxquelles personne ne pense et qui sont pourtant la solution de certains de nos probl�mes ; notre force de proposition doit donner le plein de sa mesure.
Les libert�s
D�fenseurs des libert�s, nous devons continuer de veiller, sp�cialement tant que le projet de loi d’adaptation de la justice � la nouvelle criminalit� n’est pas d�finitivement adopt�, � ce que l’autorit� publique qui s’appuie aujourd’hui sur une opinion qui pense trop � la s�curit� et pas assez � sa libert�, n’aille pas au del� des limites acceptables.
Il r�gne actuellement dans notre soci�t� un climat d�testable ; les avocats sont les premiers � se rendre compte, parce qu’ils fr�quentent les Tribunaux, parce qu’ils rencontrent les policiers, parce qu’ils visitent les prisons, � quel point le sentiment de l�gitimit� que ressentent aujourd’hui les tenants de l’autorit� publique peut, entre de mauvaises mains, conduire � l’oppression.
Devons-nous vraiment plaider coupables ? L’esprit fran�ais peut-il s’accommoder d’une recette si am�ricaine ?
Faut-il vraiment que l’enqu�te pr�liminaire nous soit interdite ?
Comment convaincre les magistrats de recourir � d’autres sanctions que la prison ?
Faut-il que la proc�dure p�nale soit r�form�e tous les deux ans ?
Quand apprendrons-nous � mettre des coupables en libert� lorsque la proc�dure p�nale n’a pas �t� respect�e ?
Autant de d�fis qu’il nous faut continuer de relever avec �nergie.
La d�fense des libert�s ne doit pas se limiter � nos fronti�res ; le B�tonnier Jean-Michel PAULUS est le plus actif d’entre nous sur ce terrain, il aurait pu me succ�der mais notre ami alsacien pr�f�re les grands espaces africains.
La cellule " Droits de l’homme " de la CNA continuera comme par le pass� son action offensive et transportera avec �nergie au del� des mers le pouvoir de conviction de ses membres.
Les Avocats
Je l’ai dit en commen�ant, nous devons principalement penser aux Avocats car nous sommes un syndicat d’Avocats.
La d�fense de nos int�r�ts passe souvent par celui de notre p�rim�tre.
Celui-ci a �t� menac� par les experts-comptables � la suite d’une d�claration intempestive de notre Premier Ministre, il semble que les choses soient rentr�es dans l’ordre gr�ce � l’action vigilante de nos organisations et notamment la Pr�sidente de l’UNAPL ; mais il nous faut rester vigilants.
D’autres fusions nous menacent, d’autres int�grations de corps �trangers ext�rieurs se profilent � l’horizon.
Nous d�battrons �videmment ensemble de la r�ponse qu’il convient d’apporter � ces propositions ; personnellement ma d�cision sera de m’y opposer pour autant que vous m’en donniez mandat.
Il ne s’agit pas de faire preuve d’un immobilisme r�trograde ni d’une opposition frileuse � ce que certains appellent � tort le progr�s, mais seulement de conserver son �me � notre profession qui recouvre d�j� de trop nombreux m�tiers.
Nous ne pouvons �tre les salari�s que de nous-m�mes, ce qui exclut l’int�gration des juristes d’entreprise.
Nous ne pouvons tous �tre � la fois ing�nieurs et avocats, ce qui exclut me semble-t-il la cr�ation d’une cat�gorie in�galitaire d’avocats-conseils en propri�t� industrielle.
Il n’y a pas de grades sur la robe, il n’y en aura jamais.
Nous devons aussi veiller � notre statut social, nos charges nous �crasent, et m�me si l’argent que nous versent nos clients en r�mun�ration de nos travaux ne nous appartient qu’en partie, le plus souvent ceux qui nous le versent l’ignorent.
L� aussi nous serons vigilants.
Un jour nous partirons en retraite, je nous le souhaite � tous.
Mais il faut que cette retraite soit celle d’hommes riches et bien portants car il vaut mieux �tre ainsi que pauvre et malade.
Les r�centes r�formes nous ont enfin apport� une premi�re am�lioration de notre situation dans ce domaine ; mais celle-ci a une contrepartie pour l’instant une inconnue ; un texte compl�mentaire nous menace ; il importe que celui-ci soit n�goci� par toutes les composantes de la profession et non seulement par les seuls repr�sentants de la Caisse, qui n’est que l’objet de l’accord � intervenir, la CNA sera pr�sente � la table de n�gociation et elle aura beaucoup de choses � dire.
Les autres projets
Mon propos serait trop long s’il devait comprendre l’�num�ration de toutes les causes pour lesquelles je veux vous emmener au combat.
Je n’ai pas le temps ce soir de vous parler de la d�ontologie, de la formation, de l’�volution de nos structures professionnelles, de la r�forme du divorce, du statut du collaborateur lib�ral, de la certification qualit�, de l’aide juridictionnelle et de l’acc�s au droit, de l’admission des avocats �trangers, des mentions de sp�cialisation, de la formation continue, de la nouvelle tarification des honoraires, de la r�forme des Tribunaux de Commerce, de la carte judiciaire, de la r�forme des proc�dures collectives, et sp�cialement de celles qui pourraient concerner le professionnel lib�ral, bien que ce sujet soit particuli�rement important et urgent et que notre syndicat, beaucoup plus que les autres, ait une opinion � �mettre � ce propos.
Nous avons deux ans devant nous, je ne sais si j’arriverai � faire aussi bien que mes pr�d�cesseurs.
Mais je vous demande de m’aider, enfin de vous aider vous-m�mes � travers moi ; mon souhait, c’est un d�fi que je me lance, est que le nombre des adh�rents de la CNA ait doubl� au d�but du mois de d�cembre 2005.
Je suis s�r qu’ensemble nous y parviendrons.