INTRODUCTION
« Il ne faut pas nier aux arts appliqu�s une fonction sociale, l’on dirait aujourd’hui culturelle, consistant � initier le consommateur au bon go�t, � la beaut�, au confort, et � d�velopper ainsi sa sensibilit� artistique ». Cette phrase de Pierre et Fran�ois Greffe tir�e de leur « Trait� des Dessins et mod�les » convient tout � fait � la situation des architectes dont le m�tier est, selon la loi de 1977 sur l’architecture, « une expression de la culture ». En effet, le travail de l’architecte a cette originalit� qui consiste en un m�lange d’une prestation de service fonctionnelle � un fort aspect artistique.
L’�tude du r�gime fiscal des architectes et de leurs r�alisations permet de mieux saisir ce double aspect d’une profession aussi complexe qu’int�ressante. Si les architectes sont consid�r�s par le Code de Propri�t� Intellectuelle comme des auteurs d’�uvres de l’esprit, � condition que leurs r�alisations r�unissent les crit�res de forme et d’originalit�, le Code G�n�ral des Imp�ts leur refuse l’acc�s au rang d’auteurs d’�uvres d’art. Par cons�quent, les architectes sont des auteurs au r�gime fiscal particulier puisqu’ils ne peuvent pas b�n�ficier des dispositions fiscales sp�cifiques aux �uvres d’art.
En partant du r�gime fiscal, il est int�ressant de constater qu’une fois de plus la profession d’architecte se distingue par son originalit�. De plus, ceci permet de faire une confrontation des notions utilis�es en droit d’auteur et en droit fiscal pour d�finir ce qu’est une �uvre et permet de s’interroger sur les limites de la protection accord�e aux auteurs.
Profession « schizophr�ne », l’architecte est tant�t un auteur tant�t un prestataire de services profession lib�rale. Le r�gime fiscal qui lui est applicable permet de saisir cette ambivalence. Il est alors int�ressant d’�tudier le statut d’auteur de l’architecte au regard du Code de Propri�t� Intellectuelle et du Code G�n�ral des Imp�ts afin de comprendre les bases de cette schizophr�nie (I) avant de se pencher sur la mani�re dont l’architecte est saisi par le droit fiscal (II).
I - Le statut d’auteur de l’architecte au regard du code de Propri�t� Intellectuelle et du code G�n�ral des Imp�ts
La profession d’architecte est de nature complexe. En effet, l’architecte intervient � des niveaux tr�s vari�s et ses actes peuvent �tre appr�hend�s dans de nombreux domaines : droit de l’urbanisme, droit de la construction, ou bien encore droit du patrimoine et droit d’auteur. Il ressort de cette �num�ration une caract�ristique propre � la profession, � savoir qu’elle est � la fois une activit� �conomique et une expression de la culture comme le rappelle la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture. De ce fait, l’architecte est concern� � la fois par le code G�n�ral des Imp�ts ainsi que par le code de Propri�t� Intellectuelle. Reste � savoir si ce professionnel est consid�r� par ces deux codes de la m�me fa�on, ou si au contraire, il rev�t un statut propre � chacune de ces sources de droit.
En effet, l’architecte est-il consid�r� comme un auteur et uniquement comme tel ou bien conna�t-il un double statut ? Pour r�pondre � cette question, il convient d’�tudier le CPI et le CGI (A) avant d’en tirer un certain nombre de cons�quences tant pratiques que th�oriques (B).
A - L’architecte dans le CPI et dans le CGI
L’int�r�t de cette �tude est de comprendre comment s’articule au niveau fiscal la profession d’architecte avec le statut juridique de ses produits. En effet, suivant qu’il s’agit d’une �uvre de l’esprit, telle que d�finie par le CPI, il y a en principe de fortes chances pour que le CGI int�gre celle-ci dans la cat�gorie des « �uvres d’art » dont le r�gime fiscal est relativement sp�cifique. Il s’agit donc ici de v�rifier si les architectes peuvent �tre regard�s comme des auteurs et si leurs r�alisations sont susceptibles de rev�tir la qualit� d’�uvre de l’esprit et enfin celle de d’�uvre d’art (au sens du CGI).
1 - L’architecte face au code de Propri�t� Intellectuelle
L’architecte est-il auteur ?
Et dans ce cas, quelles parties de son travail doivent �tre regard�es comme �tant des �uvres de l’esprit ?
Pour r�pondre � ces questions, il convient de se r�f�rer au code de Propri�t� Intellectuelle.
D�s lors que leurs cr�ations sont originales, les architectes se trouvent prot�g�s par le droit d’auteur. Ils sont mentionn�s aux articles L. 112-2 et L. 122-3 al. 3 du CPI. Du fait de cette reconnaissance, les architectes sont alors titulaires des doits de propri�t� intellectuelle sur leurs �uvres. Si les conditions impos�es � toute �uvre de l’esprit sont respect�es, � savoir l’originalit� (l’empreinte de la personnalit� de l’auteur) et la forme, la cr�ation de l’architecte peut donc acc�der au rang des �uvres de l’esprit prot�g�es par le CPI. Ils poss�dent ainsi sur ces « �uvres d’architecture » des droits patrimoniaux et des droits moraux.
Les premiers se divisent classiquement en deux groupes, le droit de reproduction qui consiste dans la fixation mat�rielle de l’�uvre par tous proc�d�s qui permettent de la communiquer au public, et le droit de repr�sentation qui concerne la communication de l’�uvre au public. Ces droits patrimoniaux durent toute la vie de l’architecte, persistent 70 ans apr�s sa mort et ils conf�rent � leur titulaire un monopole d’exploitation source de revenus. C’est ce dernier aspect qui nous int�resse ici, puisque le CGI �tablit des r�gles sp�cifiques pour les revenus tir�s de l’existence d’un droit d’auteur. A c�t� des droits r�els et �ventuellement des droits personnels que peut poss�der l’architecte, les droits qui nous int�ressent ici sont ceux relevant des droits intellectuels qui existent sur les �uvres n�es de l’activit� intellectuelle des architectes.
Lorsque le travail de l’architecte a donn� naissance � une �uvre de l’esprit, il devient le titulaire du droit exclusif d’exploiter ce qu’il a personnellement cr��. De fa�on plus concr�te, les architectes sont titulaires du droit de propri�t� litt�raire et artistique portant sur les plans, �tudes et projets quel que soit le moyen de reproduction. La jurisprudence exige, conform�ment au CPI, que l’�uvre soit suffisamment originale.
Ainsi, gr�ce au droit moral, il a le droit de s’opposer aux atteintes port�es � l’int�grit� de son �uvre et d’exiger l’ach�vement de celle-ci. Les droits patrimoniaux, qui sont le point n�vralgique de l’�tude du r�gime fiscal applicable, permettent � l’architecte de s’opposer � l’utilisation ou � la reproduction � des fins commerciales et permettent de toucher une r�mun�ration proportionnelle au nombre d’utilisations des plans. L’utilisation des plans et maquettes pour la construction de nouveaux immeubles ou tout autre usage doit donc se faire avec l’autorisation de l’architecte et donner lieu � une r�mun�ration au profit de l’architecte-auteur.
Ce dernier a le droit d’exposer les plans et les dessins comme des �uvres artistiques ou de les reproduire dans des revues (Tribunal civil de la Seine, 21 avril 1913). Il peut aussi interdire sous peine de contrefa�on la publication de ses plans et maquettes (Cass. Crim. 26 janvier 1965), la vente de cartes postales repr�sentant uniquement son �uvre (CA Paris 1° ch. 23 octobre 1990), l’ex�cution des plans qu’il a r�alis�s (Cass. 1° civ 15 f�vrier 1977) et m�me la r�utilisation de plans pour lesquels il a touch� des honoraires (Cass 1° civ 12 novembre 1980) comme le rappelle M. Bertrand dans son ouvrage « Le droit d’auteur et les droits voisins ».
Pour ce qui est de la r�mun�ration, M. Bertrand rel�ve une originalit� pour l’architecte. Selon lui, il peut se faire r�mun�rer « sous forme de droits d’auteur ou d’honoraires. Mais le choix d’une r�mun�ration par honoraires n’implique pas pour l’architecte renonciation � ses droits d’auteur (...). Cependant, l’architecte ne peut ex�cuter � nouveau les plans qui lui ont �t� pay�s pour un autre propri�taire, sans l’autorisation de celui pour lesquels il les a dress�s ». Ces pr�cisions ont leur importance car elles laissent deviner qu’au niveau fiscal l’existence de droits d’auteur n’influera pas beaucoup sur le r�gime fiscal de cette profession qui semble demeurer avant tout lib�rale (au sens �conomique du terme) plus qu’artistique.
Le CPI comme la jurisprudence conc�de aux architectes, � tous les types d’architectes (d’int�rieur, paysagistes...) qui ont obtenu les dipl�mes requis, la possibilit� d’�tre des auteurs d’�uvres de l’esprit. La reproduction de leurs �uvres doit se faire avec leur accord et avec une contrepartie financi�re sauf cession � titre gratuit. Il convient cependant de rappeler qu’il existe des exceptions au droit d’exploitation de l’architecte : l’exception pour copie priv�e (photographie par un touriste ou un particulier � des fins purement personnelles ou familiales) et la th�orie jurisprudentielle de l’arri�re-plan (lorsque le b�timent figure en arri�re-plan du sujet principal et qu’il n’en constitue que l’accessoire). Cependant, la libert� de la forme de la r�mun�ration laisse pr�sager du refus du droit fiscal de prendre en compte l’aspect droit d’auteur de la profession d’architecte.
2 - L’ « architecte-auteur » face au code G�n�ral des Imp�ts
En se penchant sur le CGI, on s’aper�oit que celui-ci fait un sort particulier aux activit�s artistiques et intellectuelles. Ainsi, tant pour l’imp�t sur le revenu, que pour la taxe sur la valeur ajout�e (TVA) ou que pour la taxe professionnelle, le CGI a am�nag� un certain nombre de facilit�s au profit des auteurs « d’�uvres d’art ». Reste alors � savoir si les architectes, qui selon le CPI peuvent �tre consid�r�s comme des auteurs, ont aussi la possibilit� d’�tre consid�r�s comme des auteurs d’�uvres d’art telles que d�finit par le CGI. Il convient de se r�f�rer � l’article 98 A II du CGI qui donne la liste des r�alisations consid�r�es comme des �uvres d’art. Cet article se pr�sente ainsi : « Tableaux, collages et tableautins similaires, peintures et dessins, enti�rement ex�cut�s � la main par l’artiste, � l’exclusion des dessins d’architectes, d’ing�nieur et autres dessins industriels, commerciaux, topographiques ou similaires, des articles manufactur�s d�cor�s � la main, des toiles peintes pour d�cors de th��tres, fonds d’atelier ou usages analogues ».
Il faut donc en conclure qu’au regard du droit fiscal, les �uvres de l’esprit des architectes ne sont pas consid�r�es comme des �uvres d’art. Cette exclusion s’explique par le fait que ces dessins sont pr�paratoires � une �tude commerciale donc utilitaires. Les architectes ne peuvent donc pas �tre tax�s selon le r�gime de la vente ou de l’exploitation des �uvres d’art. Il en va de m�me pour ce qui est de la taxe professionnelle.
Selon le droit fiscal, les architectes ne doivent pas �tre consid�r�s comme des auteurs d’�uvres d’art. Ni les dessins, plans et maquettes ni les b�timents eux-m�mes ne sont des �uvres d’art. Il r�sulte de cette diff�rence de d�finition entre l’administration fiscale et le CPI quelques difficult�s pratiques.
Avant d’�tudier la r�alit� de la fiscalit� relative aux architectes, il semble important de mettre en avant les difficult�s issues de cette diff�rence d’appr�hension et les concepts sur lesquels se basent le CPI et le CGI pour aboutir � des situations diff�rentes.
B - L’architecte : un auteur pas toujours auteur
En fonction du droit consid�r�, il a �t� �tabli que l’architecte n’est pas toujours qualifi� d’auteur. En effet, si le droit de la propri�t� intellectuelle fait de lui un auteur, le r�gime fiscal applicable n’est pas celui que connaissent les auteurs. Une telle position n’est pas simple et met la profession d’architecte dans une situation in�dite mais elle confirme le principe de l’autonomie du droit fiscal.
1 - Les difficult�s pratiques
En tant qu’auteur, l’architecte jouit pleinement des droits patrimoniaux sur ses �uvres. Il est le titulaire de droits patrimoniaux sur ces derni�res ce qui lui permet logiquement de se garantir une source de revenus. En effet, la reproduction des �uvres d’architecture lui appartient et peut se r�aliser selon trois mani�res : le plan de l’immeuble peut �tre reproduit en tant que tel, ou bien il peut �tre mis en �uvre par la construction d’un ou plusieurs �difices qui peuvent eux-m�mes faire l’objet de reproductions. Ces trois types de reproduction n�cessitent l’accord de l’architecte. Selon la logique du droit d’auteur, � chaque reproduction doit correspondre une r�mun�ration qui sera soumise aux r�gles de la fiscalit� du droit d’auteur.
Mais le CGI pr�cise que l’architecte n’est pas auteur et que par cons�quent il ne peut pas pr�tendre au m�me traitement fiscal que les auteurs. En effet, l’architecte n’est pas tenu de se faire r�mun�rer en droits d’auteur, la simple perception d’honoraires est suffisante. Cependant, il ne semble pas s�rieux de dire que par cons�quent l’architecte n’est qu’une « moiti� d’auteur ». Certes sa d�finition fiscale ne fait pas de lui un auteur d’�uvre d’art, mais cela n’affaiblit en rien sa position d’auteur et le respect qui est d� � ses �uvres de l’esprit. L’architecte demeure titulaire de droits patrimoniaux et moraux sur son �uvre et le fait de se faire r�mun�rer en honoraires n’induit en aucun cas un renoncement � ses droits d’auteur (Cass civ 1° 12 novembre 1980). Si l’architecte n’est pas toujours vu comme un auteur, son �uvre n’en est pas moins une �uvre de l’esprit bien que son exploitation ne suive pas le r�gime fiscal habituel des �uvres d’art. Les droits patrimoniaux sont toujours dus, mais ils n’ont pas � �tre vers�s ni impos�s sous la m�me forme que les r�mun�rations classiques en droit d’auteur. Conform�ment au CPI l’exploitation de l’�uvre de l’esprit de l’architecte sera r�mun�r�e mais impos�e de fa�on classique.
Ces probl�mes de d�finition s’expliquent par une diff�rence d’interpr�tation de certains concepts qu’il est int�ressant d’�voquer � ce stade pour mieux comprendre le double visage de la profession d’architecte.
2 - Des concepts interpr�t�s diff�remment d’un code � l’autre
C’est d’abord la notion d’�uvre qui est interpr�t�e diff�remment. Le CPI se base sur la notion « d’�uvre de l’esprit ». Cette derni�re peut se d�finir comme une cr�ation de forme originale, c’est-�-dire dans laquelle peut se voir l’empreinte de la personnalit� de l’auteur. Ce code, comme l’explique N. Walravens dans « L’�uvre d’art en droit d’auteur », « ne se pr�occupe pas de l’�uvre d’art, dont il ne donne d’ailleurs aucune d�finition. En effet, le droit d’auteur ne prot�ge que l’�uvre de l’esprit, qu’il aborde de mani�re relativement floue, ceci en raison du principe de neutralit� esth�tique ».
En droit d’auteur, la notion d’�uvre d’art rel�ve plus des �uvres graphiques et plastiques. Il semble que la notion soit abord�e dans le code � l’article L. 112-2 du CPI de fa�on �clat�e, � travers plusieurs sortes de cr�ations. Pour P.-Y. Gautier, il s’agit de « productions de l’esprit, faisant essentiellement appel aux formes et � l’esth�tique » (Propri�t� Litt�raire et artistique, PUF, 1996). P. Sirinelli propose une approche plus large : « il ne s’agit pas de fa�on restrictive des �uvres correspondant � un id�al esth�tique, mais de fa�on plus g�n�rale, des cr�ations ext�rioris�es par des formes et/ou des couleurs (et sensibles, dit-on, � la vue) » (Propri�t� Litt�raire et Artistique et Droits Voisins, Dalloz, 1992).
En revanche, le CGI lui ne se pr�occupe pas des �uvres de l’esprit mais des « �uvres d’art », dont il donne une liste exhaustive � l’article 98 A. L’�tude des objets acc�dant au rang d’�uvres d’art, au sens du droit fiscal, permet d’affirmer qu’il n’y a aucune sym�trie entre l’�uvre de l’esprit et l’�uvre d’art, ce qui explique qu’une cr�ation peut �tre �uvre de l’esprit sans �tre �uvre d’art, et donc qu’une m�me personne peut �tre consid�r�e comme auteur par le CPI sans l’�tre par le CGI.
De plus, la notion de « vocation utilitaire » est int�ressante pour comprendre la dualit� qui caract�rise les cr�ations des architectes. Le CPI accorde la protection aux �uvres ind�pendamment de leur m�rite ou de leur vocation utilitaire, il importe uniquement que l’�uvre soit originale. La vocation utilitaire n’est pas en elle-m�me le crit�re permettant d’acc�der � la protection par le droit d’auteur. Au contraire, le CGI fait de ce crit�re un �l�ment indispensable de la qualification d’�uvre d’art. C’est en tout cas ce dont t�moigne l’exclusion des dessins d’architecte de cette cat�gorie.
L’�tude comparative du CPI et du CGI r�v�le que l’architecte est un auteur particulier puisque si ses �uvres peuvent acc�der au rang des �uvres de l’esprit, leur r�gime fiscal n’est pas celui des �uvres d’art et l’imposition des architectes n’est pas l’�quivalent de celle des auteurs. Cela est le fait de l’autonomie du droit fiscal qui consid�re les architectes en dehors de toute pr�occupation artistique. Cependant, il convient maintenant de se pencher plus avant sur le r�gime fiscal auquel les architectes sont soumis.
II - L’architecte saisi par le droit fiscal
Les principaux axes d’�tude concerneront l’imp�t sur le revenu, la taxe sur la valeur ajout�e (TVA) et la taxe professionnelle en lien avec la situation que connaissent les auteurs (A). Enfin, nous tenterons d’envisager quels sont les moyens existant pour que soit prise en compte la dimension artistique du m�tier d’architecte dans son mode d’imposition (B).
A - Le r�gime fiscal de l’architecte au regard de celui des auteurs
Comparativement � la fiscalit� du droit d’auteur, comment les architectes sont-ils appr�hend�s par le CGI ?
1 - L’imp�t sur le revenu
Les produits de droits d’auteur per�us par les auteurs d’�uvres de l’esprit, leurs h�ritiers ou l�gataires, sont soumis � l’imp�t sur le revenu dans la cat�gorie des b�n�fices non commerciaux. Les produits de droits d’auteur per�us par les �crivains et les compositeurs sont soumis � l’imp�t sur le revenu selon les r�gles pr�vues en mati�re de traitements et salaires, d�s lors que ces revenus sont int�gralement d�clar�s par des tiers. Les b�n�fices provenant de la propri�t� litt�raire et artistique peuvent, sur option du contribuable, �tre impos�s � raison d’un revenu annuel moyen tenant compte des deux ou quatre ann�es pr�c�dentes. Le CGI pr�voit donc deux modalit�s particuli�res de taxation selon que le revenu imposable rel�ve de la cat�gorie des b�n�fices non-commerciaux (BNC article 92-2, 2° du CGI) ou de la cat�gorie des traitements et salaires (article 93-1 et 100 bis du CGI). Il ne s’agit pas d’un libre choix offert � l’auteur mais d’une imposition s’appliquant de plein droit. Lorsque les revenus sont imposables dans la cat�gorie des BNC, il faut prendre en consid�ration les produits tir�s de l’exercice des droits de propri�t� litt�raire et artistique, les revenus de l’exploitation des droits reconnus � l’auteur sur une �uvre de l’esprit originale, quels qu’en soient la forme, le genre et la destination. Il est �galement pr�vu un certain nombre d’am�nagements relatifs au calcul ou au r�colement de l’imp�t sur le revenu.
Pour ce qui est des traitements et salaires, cette modalit� d’imposition n’existe que dans le cas des recettes de droits d’auteur int�gralement d�clar�s par des tiers. Cependant, ces produits de droits d’auteurs assimil�s � des traitements et salaires gardent leur nature de BNC.
Pour ce qui est des architectes, qui exercent une activit� artistique, le code se r�f�re � la nature de leur activit� pour d�duire le mode d’imposition auquel ils sont soumis. Ainsi, �tant une profession lib�rale, les profits qu’ils retirent de leur activit� constituent des BNC. Toutefois, selon les conditions dans lesquelles ils sont amen�s � exercer leur profession, ils pourront �tre assimil�s � des salari�s ou bien voir leurs profits ou une partie de ceux-ci tax�s dans la cat�gorie des b�n�fices industriels et commerciaux.
En tout �tat de cause, lorsque les recettes annuelles de l’architecte sont inf�rieures � 27 000 euros HT, il rel�vera en principe du r�gime sp�cial des « micro BNC ». Dans le cas contraire, l’architecte rel�ve obligatoirement du r�gime de la d�claration contr�l�e.
Si comme les auteurs, les architectes sont par principe impos�s sur la base des BNC, puisque c’est la qualit� de profession lib�rale activit� intellectuelle qui impose le choix des BNC, les facilit�s fiscales relatives � l’imp�t sur le revenu accord�es aux auteurs n’existent pas pour les architectes.
On peut aussi remarquer que l’article 885 I du CGI exclu les droits de la propri�t� litt�raire et artistique de la base d’imposition de l’imp�t de solidarit� sur la fortune. Les architectes peuvent eux �tre soumis � cet imp�t.
2 - La taxe sur la valeur ajout�e (TVA)
Les auteurs d’�uvres de l’esprit ainsi que leurs ayants droit sont en principe soumis � la TVA de plein droit pour ce qui est de la livraison de biens et des prestations de service qu’ils effectuent (articles 279-g et 279 bis 1°, 2° et 3° du CGI). Sont imposables les sommes per�ues par les auteurs au titre de l’exploitation des droits de reproduction et de la r�mun�ration pour copie priv�e. Le taux applicable est un taux r�duit de 5,5%.
Cependant, l’article 293 du CGI permet aux auteurs, gr�ce � une franchise, d’�chapper au paiement lorsqu’ils ont r�alis� au cours de l’ann�e pr�c�dente un certain chiffre d’affaires hors taxe. Il existe pour les auteurs un syst�me de retenue � la source (article 285 bis du CGI) qui fait que l’�diteur, le producteur ou la soci�t� de perception et de gestion des droits qui verse des droits d’auteur, doit retenir le montant de la TVA due par les auteurs. En revanche lorsque l’auteur agit en qualit� de salari�, les r�mun�rations correspondantes ne sont pas soumises � TVA.
Pour ce qui est des architectes, le taux r�duit de TVA n’existe pas, tout comme pour les logiciels. Par cons�quent, les architectes-auteurs ne b�n�ficient pas de la franchise, pas plus que de la retenue � la source. Les prestations effectu�es par les architectes � titre on�reux rel�vent en principe, du taux de 19,6%. Cependant, depuis l’instruction fiscale du 28 ao�t 2000 sous certaines conditions, certaines prestations sont soumises au taux r�duit de TVA d�s lors qu’elles se rattachent elles-m�mes � des travaux soumis au taux r�duit. C’est donc la nature des travaux qui permet de savoir quel taux de TVA est applicable. A titre informatif, sont exclus du taux r�duit les travaux de construction ou de reconstruction. De plus, lorsque l’architecte se voit confier une simple mission d’�tudes, ses prestations seront soumises au taux normal de 19,6%. Ce n’est donc pas en fonction de la r�alisation d’une �uvre de l’esprit ou pas, que le taux de TVA est fix�.
3 - La taxe professionnelle
Par principe, la taxe professionnelle est due chaque ann�e par les personnes physiques ou morales qui exercent � titre habituel une activit� non salari�e (article 1447 du CGI). Cependant, le CGI exon�re de taxe professionnelle un certain nombre de professions, parmi lesquelles on compte : les auteurs et compositeurs non salari�s (article 1460-3° du CGI), les peintres, sculpteurs, graveurs et dessinateurs consid�r�s comme des artistes et ne vendant que le produit de leur art (article 1460-2° du CGI), les artistes lyriques et dramatiques (article 1460-4° du CGI et depuis la Loi de Finances pour 2004, les photographes auteurs.
Pour ce qui est des architectes non salari�s, ils sont totalement redevables de la taxe professionnelle.
L’architecte exerce bien une profession intellectuelle, mais il n’en demeure pas moins soumis fiscalement aux r�gles qui s’imposent � toutes les autres professions lib�rales m�me si la particularit� de l’architecte, qui consiste en la cr�ation d’�uvres de l’esprit, le distingue de ses confr�res lib�raux. En aucun cas l’administration fiscale ne consid�re l’architecte comme un artiste b�n�ficiant d’un r�gime fiscal largement d�rogatoire et souple.
B - Comment tenir compte de la nature artistique du m�tier d’architecte dans le r�gime fiscal ?
Il semble assez difficile pour un architecte d’obtenir de la part de l’administration fiscale la m�me souplesse et les m�mes avantages que connaissent les auteurs plus « classiques ». Cependant, l’�tude du CGI r�v�le l’existence de facilit�s fiscales, mais ces derni�res sont tr�s particuli�res ce qui met en avant une nouvelle sp�cificit� de la profession d’architecte.
1 - Des avantages fiscaux : � quelles conditions ?
L’administration fiscale retient comme crit�re principal la fonction utilitaire des biens pour d�terminer s’ils peuvent ou pas �tre qualifi�s d’�uvres d’art. C’est � cause de cette fonction utilitaire que les �uvres architecturales et d’architecture ne sont pas consid�r�es comme des �uvres d’art au sens du droit fiscal. L’administration fiscale et le juge interpr�tent le caract�re esth�tique des �uvres et font de la fonction utilitaire une cause d’exclusion de la qualification d’�uvre d’art.
Un des moyens pour b�n�ficier de facilit�s fiscales se trouve dans la notion d’objets d’Antiquit�. Pour les dessins des architectes tr�s anciens, il est en effet possible de leur attribuer la qualit� d’objets d’art � condition qu’ils soient vieux d’au moins cent ans. Cette possibilit� peut avoir son int�r�t, mais elle n’int�ressera pas directement les architectes en exercice et pour cause, cette disposition est avant tout destin�e � prot�ger et faciliter la d�tention de dessins d’architectes anciens qui sont alors consid�r�s comme des objets d’Antiquit� constitutifs d’un patrimoine national et non plus comme des biens meubles utilitaires.
Les �uvres architecturales sont �galement vis�es par le CGI � travers la notion de « monuments historiques » (article 41 F, 41 bis, 41 H et 41 J). Mais une fois encore ce n’est pas � l’architecte-auteur que l’on attribue des avantages fiscaux mais aux propri�taires d’immeubles class�s monuments historiques, inscrits � l’inventaire suppl�mentaire ou faisant l’objet de l’agr�ment sp�cial pr�vu � l’article 41 H du CGI ou b�n�ficiant du label d�livr� par la « Fondation du Patrimoine ». Une fois de plus, ces avantages fiscaux sont certes accord�s parce qu’il existe un caract�re esth�tique, ou historique ou encore culturel, mais ils le sont au profit des propri�taires et non pas de l’architecte-auteur, � moins que celui-ci soit propri�taire de l’immeuble.
Dans les deux hypoth�ses, l’�uvre architecturale n’est pas consid�r�e du point de vue de son auteur mais uniquement pour sa valeur esth�tique, son apport au patrimoine culturel et par cons�quent les avantages fiscaux octroy�s ne le sont pas au profit de l’architecte mais du propri�taire qui a la charge de l’entretien.
2 - L’architecte : un auteur exer�ant une profession commerciale
H.J. Lucas et A. Lucas expliquent tr�s bien les choix du CGI de ne pas faire de toutes les �uvres de l’esprit des �uvres d’art. « L’article 92-2 du Code g�n�ral des imp�ts comprend dans les b�n�fices imposables des professions non-commerciales les « produits de droits d’auteur per�us par les �crivains ou compositeurs et par leurs h�ritiers ou l�gataires ». Si les auteurs des �uvres graphiques et plastiques ne sont pas vis�s, c’est probablement parce que le l�gislateur fiscal a pens� qu’ils tiraient l’essentiel de leurs revenus de la vente de leurs �uvres et non de l’exploitation de leur monopole d’auteur.
Mais il n’y a aucune raison logique de leur r�server un sort diff�rent » (Trait� de la Propri�t� Litt�raire et Artistique, 2° �dition Litec). Les architectes semblent s’inscrire dans cette exception fix�e par le l�gislateur fiscal et ne b�n�ficient par cons�quent pas du statut fiscal des auteurs.
Au regard du droit fiscal, c’est donc la dimension de profession lib�rale commerciale qui prime sur l’aspect intellectuel du m�tier d’architecte et l’administration fiscale consid�re de plus que les �uvres des architectes sont toutes par d�finition fonctionnelles et que par cons�quent elles ne peuvent pas �tre des �uvres d’art.
Les architectes sont donc d�finitivement soumis � un r�gime fiscal classique aux professions lib�rales et ne sont jamais consid�r�s fiscalement comme des auteurs.