Aujourd’hui, les principaux sites concurrents et pirates comme NAPSTER et MP3 ont �t� rachet�s par les majors et ne sont plus une menace. Depuis la plainte d�pos�e en d�cembre 1999 contre Napster pour violation des droits d’auteur, les majors du disque (BMG, EMI, SONY, UNIVERSAL et WARNER) r�unis au sein de l’association am�ricaine de l’industrie de l’enregistrement (RIAA) n’ont eu, en effet, de cesse de s’attaquer � tous les fournisseurs de contenus musicaux illicites. Apr�s NAPSTER, l’industrie du disque s’est attaqu� � MP3, Launch.com, Aimster... Les proc�dures ont abouties � des rapprochements divers et notamment � la cr�ation de deux p�les puissants : d’un c�t� PRESSPLAY cr�� par VIVENDI UNIVERSAL et SONY le 22 f�vrier 2001, qui en rachetant MP3 le 21 mai 2001, s’est adjoint les comp�tences de l’ancien pirate. De l’autre, MUSICNET, cr�� le 2 avril 2001, par BMG, EMI et AOL TIME WARNER qui a pass� un accord de distribution avec NAPSTER.
Aujourd’hui, on constate que les solutions de s�curit� et de protection des oeuvres sur le net sont plus nombreuses et plus efficaces que dans le monde physique et que ce sont d�sormais des probl�mes totalement ind�pendants des questions technologiques et juridiques qui bloquent l’expansion de ce nouveau march�.
I - La s�curisation technologique et juridique du march� de la musique en ligne
a) La s�curisation technologique du march� de la musique en ligne
Les moyens de protection des oeuvres n’ont jamais �t� aussi nombreux et efficaces sur Internet et sont finalement bien sup�rieurs � ceux utilis�s dans le monde physique. La technologie permet, en effet, de recenser avec exactitude les utilisations faites des oeuvres alors que dans la r�alit�, les soci�t�s d’auteur sont parfois oblig�es de recourir aux sondages pour �valuer l’utilisation qui est faite de celles-ci.
Il y a deux ans, l’industrie musicale a �t� secou�e par le MP3. Avec ce format de fichier, il devenait facile de cr�er, diffuser et partager des fichiers musicaux compacts avec une qualit� audio comparable � celle obtenue sur les CD. Plusieurs groupes de l’industrie musicale et des g�ants technologiques se sont alors regroup�s pour cr�er le SDMI (secure digital music initiative ou projet pour la protection de la musique num�rique visant un effort de gestion des droits num�riques : Digital rights management (DRM)). Gr�ce aux normes de la SDMI, les �diteurs peuvent prot�ger leurs fichiers MP3 des copies ill�gales et garantir une compensation pour toutes les personnes concern�es.
De nombreuses start-ups ont d�velopp� des produits aptes � prot�ger la diffusion d’oeuvres sur Internet. Ainsi, Copyright.net : la soci�t� a d�velopp� un logiciel qui �pie en temps r�el la diffusion d’un titre. Une maison de disque dot�e de cet outil obtient des rapports sur le nombre d’utilisateurs en possession d’un titre d�termin�, sur sa propagation g�ographique, sur l’internaute, son lieu de connexion et son fournisseur d’acc�s sur internet.
Le marquage des oeuvres num�riques est �galement une protection compl�mentaire. Ce proc�d� inscrit sur l’oeuvre une sorte de tatouage num�rique sur lequel figure l’origine de la cr�ation, les noms des titulaires des droits sur celle-ci, le contenu g�n�ral de l’oeuvre, ses utilisations possibles et sa destination.
Parall�lement � ces moyens de s�curit� technologiques, le champ du droit s’est �largit au num�rique.
b) L’encadrement juridique
La directive europ�enne sur les droits d’auteur � l’�re num�rique a �t� adopt� le 9 avril dernier et les Etats membres ont 18 mois pour la transposer dans les l�gislations nationales. La directive a pour but d’adapter le droit d’auteur � l’environnement num�rique et d’harmoniser ce droit dans les Etats de l’Union europ�enne.
En France, la SACEM/SDRM et SESAM ont mis en place des conditions d’autorisation destin�es � r�pondre aux services de distribution d’oeuvres musicales par t�l�chargement dont l’objet est de permettre :
l’utilisation du r�pertoire dont SESAM exerce la gestion pour les besoins de la r�alisation du site vis�,
l’enregistrement sonore d’oeuvres musicales du r�pertoire de la SACEM dans une base de donn�es,
la communication de ces enregistrements au public et l’offre aux utilisateurs de t�l�charger sur le disque dur de leur ordinateur des fichiers musicaux qu’ils auront pr�alablement choisis,
l’�coute de ces oeuvres musicales en temps r�el.
Ces accords pass�s avec les fournisseurs de contenus ont un caract�re exp�rimental et sont limit�s dans le temps mais ils apportent la preuve que la diffusion de musique en ligne n’est pas hors du champ du droit et des contrats. Conform�ment au code de la propri�t� litt�raire et artistique, la r�mun�ration des auteurs est proportionnelle aux recettes. Un taux de 12% du prix HT est acquitt� par l’utilisateur qui t�l�charge le fichier, couvrant ainsi le droit de reproduction et le droit de repr�sentation en cause, sous r�serve d’un minimum de 0,2 euro.
Enfin, les services concern�s offrant �galement l’�coute en temps r�el (streaming), pr�alablement au t�l�chargement, il est d�termin� un forfait mensuel variable en fonction de l’importance des pages vues et d�clar�es.
L’autorisation accord�e est globale et r�unit au sein d’un m�me contrat, les soci�t� d’auteurs comp�tentes, SACEM, SDRM et SESAM.
Cependant, s�curisation technologique et juridique ne suffisent pas � donner une v�ritable impulsion � l’expansion de ce nouveau march� de la musique en ligne.
II - ...ne suffisent pas � l’expansion d’un v�ritable march� de la musique sur Internet
La SACEM cr��e en 1851, est l’objet de vives critiques tant dans sa gestion que de part son statut d�rogatoire au droit des soci�t�s commerciales. Entreprise de droit priv� sous tutelle du Minist�re de la Culture, elle �chappe � la concurrence et aux organismes de contr�le financier tel la Cour des Comptes. Son pouvoir et sa gestion ont �t� r�cemment tr�s contest�s. Par ailleurs, le contr�le bi-polaire du march� de la musique en ligne par les majors avec la cr�ation de PRESSPLAY et MUSICNET m�contente les ind�pendants qui voient dans l’internet un moyen de se faire une place au soleil au m�me titre que les grands groupes. Enfin, tous se heurtent � une difficult� propre � l’internet : la gratuit� des services et des informations.
a) La contre-attaque des ind�pendants
Dans un march� du disque domin� par cinq majors companies (VIVENDI UNIVERSAL, AOL TIME WARNER, BMG, SONY, EMI-VIRGIN) les ind�pendants plaident pour une meilleure accessibilit� au march� qu’il soit traditionnel ou d�mat�rialis� comme celui de la nouvelle �conomie. L’IMPALA (Independant Music Companies Association) regroupe 1 500 producteurs europ�ens ind�pendants qui sont en train de tisser une toile s’inscrivant de mani�re concr�te dans l’�conomie num�rique. En effet, face aux grands p�les, les ind�pendants ont d�cid� de prendre toute leur place. Si la concentration de l’�dition phonographique est in�luctable, et le disque pas plus qu’une autre ne peut y �chapper, les producteurs ind�pendants sont indispensables notamment gr�ce � Internet qui doit servir � multiplier et diversifier l’offre.
Ainsi le 26 juin 2001, NAPSTER a sign� un accord de coop�ration avec quelque 150 labels ind�pendants europ�ens en vue de la mise en place d’un nouveau service musical par abonnement auquel travaille la start-up. Cet accord historique autorise NAPSTER � exploiter le catalogue des labels affili�s � l’Association of Independant Music (AIM) et � l’IMPALA dans le cadre de la nouvelle version payante et s�curis�e de son service. Ceci am�ne donc la question la plus minante du net : le passage du service gratuit au service payant.
b) Le passage du gratuit au payant
S’il est encore difficile de pr�voir le mod�le �conomique qui va l’emporter (diffusion par streaming ou par t�l�chargement) un consensus semble s’op�rer autour de solutions techniques incluant des formules d’abonnement mettant fin aux posssibilit�s actuelles de musique gratuite. Selon une �tude r�alis�e en mai 2001, par Benchmark Group (�diteur du Journal du Net) pour le compte du syndicat de l’�dition phonographique (SNEP) aupr�s de 1 200 internautes, 45% d’entre eux d�clarent pratiquer l’achat de disques sur Internet. 30% d�clarent le faire pour une petite partie, 13% pour la majeure partie et 2% pour l’int�gralit� de leurs acquisitions. Si la formule du t�l�chargement au choix de certains titres d’un album s�duit la majorit� des internautes, ceux-ci en revanche attendent de ce mode d’acc�s � la musique qu’il leur permette, avant tout, des �conomies substantielles. 4% seulement d’entre eux sont pr�ts � payer plus de 100 francs un disque vendu 120 francs dans le commerce, la majorit� �valuant en moyenne � 56 francs, soit environ la moiti�, la somme � consacrer au t�l�chargement d’un album. Pour une chanson, les internautes int�ress�s par le syst�me se d�clarent dispos�s � acquitter entre 10 et 19 francs.
La majorit� des acteurs s’accorde � dire que les sites de t�l�chargements gratuits ne sont pas viables. Un constat qui devrait d�courager toute v�ll�it� de lancer de nouveaux sites �quivalents � ceux de NAPSTER ou de MP3 m�me si certains (une minorit�) sont toujours convaincus que la distribution en ligne gratuite r�pond � la demande des consommateurs et que ces supports sont � haute valeur ajout�e pour les annonceurs et donc g�n�rateurs de revenus publicitaires pour leurs propri�taires, comme ce fut le cas avec la t�l�vision gratuite.
Ainsi, malgr� les efforts de s�curisation, de l�galisation et de rapprochements, malgr� son poids face aux ind�pendants et aux start-ups, qui ont r�v�l� une grande fragilit� �conomique, l’industrie musicale compos�e des majors n’a donc toujours pas conquis le march� de l’internet. Les prochains mois devraient �tre l’occasion de nouveaux rebondissements et partenariats avant de voir se d�velopper une r�elle �conomie de la musique en ligne.