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COPYRIGHT & DROITS D’AUTEUR
L’�uvre d’art multim�dia (II - A & B)
Publié le lundi 18 octobre 2004
Par Delphine Valleteau de Moulliac
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On sait que les �uvres multim�dias, dites aussi num�riques, sont prot�geables par le droit commun d�s lors qu’elles sont marqu�es de l’empreinte de leur auteur et susceptibles d’�tre reproduites sur un support mat�riel. Pour qu’une �uvre soit prot�g�e, il faut alors qu’elle soit originale mais aussi qu’elle soit exprim�e de mani�re tangible.

Il s’agit � pr�sent de s’interroger sur les cons�quences de la qualification et donc du r�gime d�gag� sur les �uvres d’art r�alis�es par des artistes utilisant les nouvelles technologies telles le multim�dia et le num�rique.

II - Incidences de la protection par le droit d’auteur sur l’�uvre d’art multim�dia

"Parler d’art aujourd’hui ne peut pas se faire sans parler de technologie," Bill Viola

Il s’agit de d�terminer s’il existe un art multim�dia � proprement parl�.

Il convient dans un premier temps de donner une d�finition de l’�uvre d’art et ses caract�ristiques.

Une �uvre est une cr�ation intellectuelle. Mais si toutes les �uvres d’art sont des �uvres de l’esprit, toutes les �uvres de l’esprit ne sont pas des �uvres d’art. Ainsi selon M.Duret-Robert (1), " les �uvres d’art sont des meubles corporels, dans lesquels s’incorpore l’�uvre de l’esprit, originale constituant une cr�ation graphique ou plastique ". Et de pr�ciser que si " ce crit�re (d’originalit�) ne peut convenir aux �uvres dites " factuelles " (compilations ou bases de donn�es) ou " fonctionnelles " (logiciels), il semble demeurer valable pour les �uvres � caract�re esth�tique ".

Le l�gislateur alors que la loi du 10 juillet 2000 relative au march� de l’art et ses institutions lui donnait l’occasion de se prononcer sur cette notion d’�uvre d’art se contente d’�num�rer la liste des biens mobiliers consid�r�s comme des �uvres d’art. Il donc revenu aux juges de pr�ciser la notion.

La d�finition juridique de l’�uvre d’art prend non seulement en compte la notion d’originalit� qui se r�f�re � l’�uvre mais la conjugue avec celle d’authenticit� qui elle renvoie � l’auteur. Et il convient d’ajouter que c’est de l’authenticit� et de l’unicit� de l’�uvre d’art que d�coule sa valeur �conomique.

Dans un second temps il s’agit de pr�ciser la notion d’�uvre d’art multim�dia. C’est une pratique artistique qui se sert des techniques et des technologies de notre �poque. Certains consid�rent que l’art num�rique est un art abstrait, sans mati�re. En effet, il s’agit d’une suite de chiffres 0 et 1 m�moris�e sur divers supports ou m�dias tel que un CD-rom ou un disque dur. L’�uvre est ainsi red�finie. L’art multim�dia ou num�rique est un art total o� l’art devient technique. De par son �ventuelle interactivit�, l’�uvre multim�dia a une potentialit� qui lui permet d’aller plus loin que les �uvres traditionnelles. En effet, elle peut �tre soumise aux modifications, � la participation des visiteurs ou des utilisateurs.

L’art contemporain se fait le t�moin de l’�volution actuelle des supports de cr�ation.

La num�risation permet la disparition du support mat�riel proprement dit. Or l’�uvre m�me si elle est originale c’est-�-dire portant l’empreinte de son auteur �chappe � la protection du droit d’auteur si elle n’est pas susceptible d’�tre reproduite sur un support mat�riel. En effet, la manifestation de cette empreinte n�cessite une expression concr�te, une forme.

Il est important de noter que l’originalit� de l’�uvre est insuffisante � elle seule pour permettre l’acc�s � cette derni�re � la protection. Cela signifie t’il que les artistes usant des nouvelles technologies que sont le multim�dia et le num�rique ne peuvent b�n�ficier d’un droit exclusif sur leurs cr�ations ?

De plus, certains auteurs et notamment Nadia Walravens n’h�sitent pas � d�montrer qu’il y a aujourd’hui " un d�calage entre le droit et l’art du fait de la d�mat�rialisation de l’�uvre et d’un semblant de d�personnalisation ". Le d�faut d’empreinte de personnalit� de l’auteur rend la cr�ation banale, la condition d’originalit� n’�tant pas remplie.

Fort est de constater que, selon certains auteurs, les pratiques artistiques contemporaines remettent en cause les conditions de forme et d’originalit� pos�es par le droit d’auteur. Or il semble que les �uvres d’art multim�dias ne devraient pas poser plus de difficult�s que des �uvres traditionnelles et acc�der � la protection de droit commun (A).

Dans le milieu du march� de l’art, une �uvre originale est n�cessairement authentique. En effet, une �uvre d’art a une valeur marchande qui d�pend essentiellement de son authenticit� et de son unicit�. Mais le fait que l’�uvre d’art multim�dia en ligne puisse �tre copi�e plusieurs fois et se perfectionner avec la participation d’un utilisateur ne remet-il pas en question les notions d’authenticit� et d’unicit� (B).

A - Les conditions d’originalit� et de forme pos�es par le droit d’auteur � l’�preuve de l’art multim�dia

"Se rappeler qu’un tableau avant d’�tre un cheval de bataille, une femme nue ou une quelconque anecdote, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain sens assembl�es". Maurice Denis (1870-1943)

En France, le droit d’auteur est � appr�hender dans une optique personnaliste. Il est en ainsi d’apr�s les dispositions de l’article L112-1 du code la propri�t� intellectuelle. Seules les �uvres originales sont prot�g�es. Cela signifie que seulement celles dans lesquelles se manifestent la personnalit� de l’auteur. Cependant les pratiques artistiques actuelles semblent remettre en cause la protection qui pourrait �tre accord�e � ces cr�ations contemporaines. En effet, il convient de constater que l’empreinte de la personnalit� de l’auteur n’est pas toujours �vidente et par cons�quent, pas toujours appr�ciable. Il en d�coule que cette appr�ciation d�licate de l’empreinte de la personnalit� de l’auteur requise par le droit ne met pas en valeur l’originalit� de l’�uvre.

Il convient de pr�ciser ce qu’il faut entendre par empreinte de la personnalit� de l’auteur en mati�re artistique. Or il convient de rappeler que l’originalit� n’est pas appr�ci�e en fonction de crit�res artistiques ou de qualit�. Elle consiste en une appr�ciation subjective de la part du juge saisi.

S’agit-il de la signature de l’auteur appos�e sur l’�uvre ou de l’id�e qu’a eu l’artiste et qui prend forme ?

Les �uvres d’art contemporaines, multim�dias ou num�riques ainsi que les pratiques esth�tiques nouvelles tendent � apporter une certaine confusion entre forme et id�e.

Les nouvelles formes d’art sont souvent per�ues comme des pratiques conceptuelles. Il convient de rappeler que l’art conceptuel consiste en la primaut� de l’id�e sur la forme, sur la repr�sentation. Certains lorsqu’ils �voquent l’art num�rique y voient un art abstrait qui s’affranchit des r�gles de l’imitation de la r�alit� selon la loi de perspective traditionnnelle.

Mais on sait que l’id�e en elle-m�me n’est pas reconnue comme �uvre en droit fran�ais. En effet, les id�es sont exclues de la protection du droit d’auteur.

On sait que sont nombreux ceux qui consid�rent que la num�risation entra�ne la disparition du support mat�riel. Il s’agirait donc d’un art sans mati�re, sans corps physique.

Cela revient alors � s’interroger sur la nature de l’art num�rique ou de l’art multim�dia usant du num�rique.

Puisque le support dispara�t, on peut parler alors de d�mat�rialisation de l’�uvre d’art num�rique. Et face � cette immat�rialit�, l’empreinte de la personnalit� est difficilement appr�ciable. L’originalit� de l’�uvre fera alors d�faut. De plus, si l’art num�rique est immat�riel, dans quelle mesure la condition de forme requise par le droit d’auteur peut-elle �tre remplie ? L’art num�rique est-il un art immat�riel ?

L’immat�rialit� se rapporte � tout ce qui ne comporte pas de corps, � tout ce qui est intangible. Est, d’apr�s cette d�finition, immat�rielle, toute chose qu’on ne peut percevoir par le toucher.

Or la num�risation qui pour certains entra�ne la disparistion du support mat�riel consiste en la transcription en une suite de bits, en un langage binaire des donn�es. Une �uvre d’art num�rique, une image par exemple, est l’interpr�tation par l’ordinateur d’un pressage informatique, �lectronique techniquement ma�tris� par l’artiste.

Est-il vraiment exact que l’�uvre d’art num�rique ou celle multim�dia qui fait appel � la num�risation est immat�rielle ?

Poss�de t-elle un corps ?

Est-il possible de la percevoir par le toucher ?

Est-il inexact d’avancer que l’�uvre d’art multim�dia ayant recours � la num�risation et l’�uvre num�rique poss�de un corps ?

En effet, le corps ne dispara�t pas. Il prend la forme d’une suite de chiffres. Le corps de l’�uvre num�rique est alors le langage binaire.

Ce dernier est tangible. Mais y acc�der afin de le percevoir par le toucher n’est point �vident.

Si on consid�re l’�uvre d’art multim�dia ou num�rique a un corps qui peut �tre touch� alors elle est mat�rielle. Le support de l’�uvre est bien pr�sent. En aucun cas, il ne dispara�t par la num�risation des �l�ments la composant, le support prenant la forme d’un langage binaire � rechercher dans les m�andres de l’ordinateur.

Afin d’illustrer ce propos, il convient de signaler qu’un code d’acc�s d’une image num�rique de l’artiste Fred Forrest a �t� c�d� lors d’une vente aux ench�res en 1997. Les �uvre d’art num�riques ou multim�dias prennent la forme d’un code qui r�v�le la forme, le corps de l’�uvre.

La condition de forme requise par le droit d’auteur permettant l’acc�s � la protection �tant remplie, qu’en est-il de la condition d’originalit� ?

Si on consid�re que les �uvres d’art sont n�cessairement des �uvres prot�g�es ou prot�geables, il convient de tenir compte de la condition qu’exige la jurisprudence pour accorder la protection. Il s’agit de l’originalit� appr�ci�e subjectivement par le juge. La notion d’originalit� est ramen�e en derni�re analyse au lien qui existe entre l’�uvre et son auteur lorsque l’empreinte de la personnalit� de ce dernier n’est pas imm�daitement d�celable.

En effet, dans quelle mesure appr�cier l’empreinte de la personnalit� de l’auteur lorsque fait d�faut la signature de l’auteur et surtout dans le cas des oeuvres interactives lorsque plusieurs personnes sont susceptibles d’apporter � la composition de l’�uvre leur part de personnalit� ?

Le d�faut de signature ou de traces de la personnalit� du cr�ateur signifient-ils pour autant que ce dernier n’est pas � l’origine de la cr�ation ?

Si on consid�re que l’�uvre multim�dia est une �uvre collective, il semble que la difficult� sur ce point ets �vacu�e. En effet, les diff�rents contributeurs � l’�uvre travaillent sous la direction d’un promoteur qui est � l’initiative de la conception de l’�uvre et non pas en concertation. De plus on sait que ce cas de figure en droit d’auteur fran�ais est exceptionnel. Il n’est envisageable que lorsque les conditions permettant la qualification d’�uvre de collaboration ne peuvent �tre remplies.

Mais, en raison de l’interactivit�, potentialit� de l’�uvre, le rapport de l’auteur � l’�uvre change. En effet, l’�uvre peut �tre soumise aux modifications des visiteurs. L’utilisateur est invit� par le cr�ateur � apporter sa touche personnelle � l’�uvre par exemple en modifiant certains �l�ments de la composition ou en n’en supprimant certains ou encore en n’en rajoutant.

On assiste alors � une remise en cause de l’originalit� dans son appr�ciation subjective effectu�e par les juges. La solution pourrait �tre d’envisager plut�t une appr�ciation objective de l’originalit� de l’�uvre mais sans perdre de vue la conception personnaliste du droit d’auteur.

Est-ce que l’auteur, le cr�ateur � l’origine de la cr�ation, perd pour autant sa place primordiale dans la cr�ation artistique ?

Cette question en am�ne une autre. Qui est � l’origine de la cr�ation artistique ? Qui a eu l’id�e de lui donner forme ?

L’artiste a l’initiative de l’�uvre. C’est � lui qu’appartient la volont� de rendre sa cr�ation interactive. C’est lui qui d�cide de faire participer � son �uvre des visiteurs ou utilisateurs. Et c’est encore lui qui d�cide d’ins�rer dans sa composition artistique un logiciel permettant aux visiteurs d’apposer leur touche, de modifier l’�uvre. Or m�me si le cr�ateur fait appel � des techniciens, des informaticiens pour mettre en forme son travail, il n’en reste pas moins instigateur. Et l’�uvre, r�sultat de la participation de plusieurs intervenants, utilisateurs et techniciens, n’en est pas moins originale. En effet, la Cour de cassation dans un arr�t rendu le 13 octobre 1993 a jug� qu’ " une �uvre d’art est originale d�s l’instant o� elle avait �t� r�alis�e selon les instructions de l’artiste et sous son contr�le ".

L’�uvre recevra la qualification d’�uvre collective, qualification la plus adapt�e pour l’�uvre multim�dia selon certains auteurs, en raison des investissemnts n�cessaires au d�veloppement des programmes et de la multiplicit� des intervenants. En effet, l’�uvre est cr��e � l’initiative d’une personne qui la divulgue, la publie sous son nom et r�alis�e sous sa direction. La contribution de chaque intervenant ne peut �tre individualis�e et doit �tre consid�r�e comme mineure par rapport � l’ensemble et donc ne justifie pas le statut d’auteur. C’est alors � l’artiste sous la direction duquel l’�uvre est r�alis�e que revient la titularit� des droits d’auteur. Seul l’artiste b�n�ficie d’un droit de propri�t� exclusif ind�pendant de l’objet mat�riel sur lequel l’�uvre est repr�sent�e.

Ce droit permet � l’auteur la possibilit� de tirer profit de sa cr�ation, de se faire r�mun�rer du fait de tous modes d’exploitation de son �uvre.

Il convient de rappeler que l’acquisition d’une �uvre d’art multim�dia ou num�rique ne conf�re pas l’int�gralit� des droits traditionnnellement attach�s � la propri�t� � l’acheteur. En effet, le droit d’exploiter reste une pr�rogative de l’artiste.

On sait que l’�uvre est le reflet de son auteur, l’auteur dispose au titre de son droit moral de pr�rogatives extrapatrimoniales. Si est remis en cause par l’art multim�dia le lien irr�ductible unissant l’�uvre � son auteur notamment du fait de son interactivit�, il convient de constater alors que l’authenticit� de l’�uvre est n�cessairement remise en question ainsi que le droit moral de l’auteur. De plus, on sait que l’authencit� ainsi que l’unicit� font la valeur �conomique de l’�uvre d’art. Qu’en est-il alors de la valeur de l’�uvre d’art multim�dia et de son int�gration sur le march� de l’art ?

B - L’authenticit� et l’unicit� de l’�uvre d’art � l’�preuve du multim�dia

Selon la d�finition juridique de l’�uvre d’art, la notion d’authenticit� renvoyant � l’auteur se conjugue avec celles d’originalit� et d’unicit� qui se r�f�rent l’une et l’autre � l’�uvre. Cette derni�re prend de la valeur du fait qu’il n’en existe qu’un exemplaire unique.

Or la notion d’authenticit� est ignor�e du droit d’auteur. Et certains auteurs estiment que cette d�finition est remise en question par l’art num�rique. Ils consid�rent que l’auteur perd sa place primordiale dans la cr�ation artistique.

En effet, le fait que toute �uvre diffus�e sur un support num�rique puisse �tre recopi�e � l’identique et � l’infini sans que son auteur ne puisse percevoir un quelconque d�dommagement pour sa cr�ation ainsi que le fait que l’�uvre se perfectionne avec la participation du spectateur remettent en cause les notions d’authenticit� et d’unicit�.

Que faut-il entendre par authenticit� de l’�uvre d’art ?

Est dite authentique une �uvre qui �mane effectivement de l’autheur auquel on l’attribue.

C’est de l’authenticit� des �uvres d’art que d�pend le plus souvent la qualit� qui d�termine leur acquisition. En effet, l’authenticit� des �uvres s’appr�cie dans le contexte du march� de l’art. Elle qui conditionne en partie l’acquisition d’�uvres. Ainsi, le d�faut d’authenticit� devant �tre confirm� par un expert judiciaire de l’�uvre acquise est fr�quemment l’�l�ment de fait retenu par les juges pour prononcer la nullit� de la vente.

Cependant, l’authentification d’une �uvre traditionnelle reste une d�marche relative. En effet, dans quelle mesure peut-on affirmer qu’une �uvre r�alis�e il y a plusieurs si�cles est authentique ? Il appartient aux experts, aux conservateurs ainsi qu’aux ayants-cause de l’artiste de se prononcer sur l’authenticit� de l’�uvre. Cependant, m�me pour ces professionnels, la t�che demeure ardue. Quant aux h�ritiers de l’artiste, s’ils s’estiment autoris�s � d�cider de l’authenticit� ou de la non-authenticit� de certaines �uvres, il s’agit d’une simple autorit� de fait souvent contest�e par les juges lorqu’ils sont saisis.

Qu’en est-il de l’authenticit� des �uvres d’art multim�dias ?

Une �uvre de l’esprit est prot�geable d�s lors qu’elle porte l’empreinte de la personnalit� de son auteur et qu’elle est susceptible d’�tre reproduite sur un support mat�riel. Le droit conf�re � l’auteur de l’�uvre prot�g�e des droits patrimoniaux qui naissent dans son patrimoine et des droits extrapatrimoniaux attach�s � sa personnalit�. Selon les dispositions de l’article L111-3 du code de la propri�t� intellectuelle, la propri�t� incorporelle est ind�pendante de la propri�t� corporelle. De plus, l’article L121-1 du code de la propri�t� intellectuelle relatif aux droits extrapatrimoniaux de l’auteur pr�cise qu’il s’agit juste de la pr�servation de l’�uvre et de son auteur par le biais des attributs du droit moral. Ainsi sont des limites au droit de propri�t� corporelle d’une �uvre le droit au respect, le droit de divulgation de l’�uvre, attributs du droit moral du cr�ateur. De plus, le droit moral permet aussi la contestation de l’authenticit� de l’�uvre.

En effet, qui pourrait �tre plus qualifi� que l’auteur lui-m�me pour affirmer sa paternit� sur une �uvre.

On sait que la d�finition juridique de l’�uvre d’art conjugue la notion d’authenticit� et celle d’originalit�. Si l’une est mise cause, cela rejaillit n�cessairement sur la seconde. Certains consid�rent que dans l’art contemporain, il existe un rapport distanci� de l’artiste � l’�uvre. Mais le lien qui l’unit � sa cr�ation n’en subsiste pas moins. La touche de l’artiste est bien r�elle. M�me si l’artiste invite les visiteurs � une participation active, il n’en reste pas moins le concepteur initial � qui il convient d’attribuer l’�uvre. M�me si l’empreinte de la personnalit� de l’artiste n’est pas imm�diatement d�celable, il n’en reste pas moins qu’elle est bien pr�sente. Il est alors n�cessaire de pr�server l’existence du droit moral. En effet, la justification des sp�cificit�s des droits accord�s � l’artiste est � rechercher dans le lien �troit unissant l’�uvre � son auteur, traduisant une approche subjective de la cr�ation.

Si les �uvres d’art multim�dias sont plus difficilement appr�hendables que les �uvres traditionnelles, il n’en demeure pas moins qu’elles n�cessitent une protection du droit d’auteur et plus particuli�rement du droit moral. En effet, seuls "les pr�rogatives du droit moral permettent de garantir � l’artiste le respect de sa personnalit� incarn�e dans l’�uvre" selon Nadia Walravens.

Les principes pos�s par le code de la propri�t� intellectuelle lorqu’il s’agit d’�uvres contemporaines num�riques ou multim�dias trouvent alors � s’appliquer et ont une incidence r�elle sur le march� de l’art.

Mais le droit d’auteur n’est pas absolu. Il existe des " servitudes l�gales des auteurs " accord�es au public dans une perspective d’int�ret g�n�ral.

L’article L122-5 du code de la propri�t� intellectuelle �num�re ces temp�raments au droit exclusif de l’auteur. A leur nombre figure l’exception de copie priv�e qui vise un usage dans la sph�re priv�e de l’�uvre. Mais le concept de copie priv�e semble peu adapt� au monde digital. En effet, par le biais du t�l�chargement, les domaines du public et du priv� tendent � se confondre.

En effet, l’opposition classique entre copie et original n’a plus lieu d’�tre en raison du caract�re de multiplicit� de l’�uvre num�rique. En effet, tout original est une copie et vice-versa. L’effectivit� de notre syst�me juridique est alors mise � rude �preuve par la facilit� de reproduction des �uvres num�riques.

Faut-il revenir sur le principe de la copie priv�e ?

Il convient de rappeler que d�s lors que l’�uvre est prot�g�e, il appartient � l’auteur d’autoriser ou non une mise � disposition de celle-ci au public. Mais d�s que l’�uvre num�ris�e est mise en circulation on-line, l’auteur perd le contr�le de la diffusion. En effet, le r�seau num�rique pose le probl�me du clonage des �uvres et de l’identification des contrefa�ons. Si les cr�ations intellectuelles ont vocation � demeurer la propri�t� de leurs auteurs par l’effet contraignant du droit, il convient de se doter de mesures appropri�es pour garantir l’efficacit� de notre syst�me juridique.

En effet, la facilit� de la contrefa�on sur le r�seau num�rique prouve que la protection juridique des cr�ations num�riques n’est pas satisfaisante pour garantir � elle seule la gestion paisible des �uvres diffus�es sur le r�seau.

Est-il n�cessaire alors de recourir � des mesures techniques ou bien convient-il de consid�rer comme il l’est usage en mati�re de sculptures que seuls les premiers exemplaires sont des originaux ?

Les moyens techniques propos�s pour garantir la protection accord�e � l’auteur quant � la reproduction de son �uvre sont au nombre de deux. Il s’agit d’une part d’un m�canisme de cryptage, le cryptologue, et d’autre part du marquage des �uvres num�riques.

Le recours � la technique de la signature �lectronique permet l’identification et l’authentification de l’utilisateur. La protection est alors imm�diate et autosuffisante. Elle consiste en des conteneurs englobant des informations au sein d’une enveloppe chiffr�e. Cette derni�re est envoy�e avec une description du contenu de l’objet command�. Le syst�me de la signature �lectronique permet l’identification de l’usager et l’envoi d’un formulaire d’achat. Un centre de gestion enverra � cet utilisateur une cl� ou un code detin�s � ouvrir le conteneur. L’acqu�reur pourra alors reproduire et distribuer ais�ment le cryptologue � des tiers. Or ces derniers ne pourront acc�der aux contenus qu’apr�s avoir effectu� les d�marches aupr�s du centre de gestion des droits.

Le marquage des �uvres num�riques a pour fonction de prouver la violation du copyright et non pas de pr�venir les actes de contrefa�on comme le cryptologue. Il s’agit d’un tatouage num�rique de l’�uvre sur lequel figure l’origine de la cr�ation, les noms des titulaires des droits sur l’�uvre, ainsi que son contenu g�n�ral, ses utilisations autoris�es et sa destination. Cette solution s’av�re la plus souple d�s lors qu’on souhaiterait r�gler le probl�me de la copie priv�e des �uvres num�riques ou multim�dias par la mise en place de moyens techniques sp�cifiques.

En mati�re d’�uvres d’art sculpt�es, la jurisprudence consid�re que sont originales et donc prot�geables les douze premi�res �ditions de l’�uvre. Serait-il possible d’envisager une telle solution en mati�re d’art multim�dia ?

Il faut reconna�tre que la difficult� concernant la copie priv�e ne serait pas �vacu�e mais juste mise en attente. En effet, le probl�me de l’exception de copie priv�e se poserait dans les m�mes termes. Cette solution est alors inad�quate.

Qu’en est-il d’un rapprochement de l�gislation fran�aise sur ce point avec le r�gime anglo-saxon du copyright ?

Le droit anglo-saxon autorise la reproduction des �uvres prot�g�es par copyright si elle ne nuit pas � son auteur. En effet, ce syst�me du copyright rel�ve davantage d’une logique marchande tourn�es vers la protection des �uvres elles-m�mes et non plus directement de l’auteur. D�fini comme �tant le droit exclusif de reproduire, de distribuer et d’adapter l’�uvre, le copyright exclut toute r�f�rence au droit moral de l’auteur. Aux Etats-Unis, le Copyrignt Act de 1976 vise la protection des �uvres originales fix�es sur un support tangible permettant la lecture, la communication ou la reproduction de l’�uvre. Les pays o� s’appliquent ce syst�me, ceux de la Common Law, reconnaissent une exception sous la notion de "fair use". Le crit�re retenu est l’usage non lucratif de l’�uvre. Il est n�cessaire que la reproduction qui est alors faite de l’�uvre sous le couvert d’usage loyal ne porte pas pr�judice � son auteur.

La jurisprudence am�ricaine a affirm� � plusieurs reprises l’application des r�gles du copyright dans le cadre du r�seau num�rique, notamment en ce qui concerne la reproduction des �uvres num�riques. Cependant cette exception de reproduction invoqu�e au titre du fair use fait l’objet d’un examen au cas par cas par les juges.

Cette solution est-elle seulement concevable dans notre syst�me juridique o� l’essence du droit d’auteur s’exprime plus particuli�rement au travers du droit moral visant � prot�ger la part de la personnalit� de l’auteur contenue dans sa cr�ation ?

La solution est-elle � rechercher dans un m�canisme d’autor�gulation o� des institutions propres au r�seau num�rique auraient pour fonction d’informer et de responsabiliser les acteurs ainsi que de pr�venir et de r�gler les litiges ?

Il ne s’agit ici que d’�num�rer quelques rem�des pour que ne disparaisse pas du fait du multim�dia et du num�rique l’exception de copie priv�e pr�vue � l’article L122-5 du code de la propri�t� intellectuelle.

L’art multim�dia n’est pas un art qui diff�re des autres en ce qui concerne le syst�me de protection des �uvres. Il convient de lui appliquer les r�gles du code de la propri�t� intellectuelle.

Cependant pour faire face � tant d’innovations dans le domaine artistique, il est n�cessaire que le march� de l’art op�re une mutation. En effet, tous les acteurs du monde de l’art ont une place � tenir dans le nouveau march� mondial de la cr�ation num�rique sous r�serve de se mettre en mouvement. Les artistes multim�dias ou num�riques sont � la recherche de m�diateurs culturels avec les institutions traditionnelles qu’elles soient priv�es ou publiques, de financement de leurs cr�ations. Si l’art est en mutation, il faut que ce mouvement s’accompagne de nouvelles r�gles et de nouvelles attitudes.

Auteur
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Delphine Valleteau de Moulliac
Juriste en propri�t� intellectuelle
Post-Scriptum

(1) DURET ROBERT Fran�ois, Ventes d’�uvres d’art, Dalloz r�f�rence, 2001, 287p

Sources :

-  LE GUENNEC Yann Multim�dia vs hyperm�dia 29/05/2002

-  LUCAS Andr�. Droit d’auteur et num�rique. Paris : Litec, 1998, 355 p.

-  Les cr�ations multim�dias. Paris : Herm�s science publications (Revue droit des technologies avanc�es. 8-2), 2001, 256 p.

-  MALLET-POUJOL Nathalie. La cr�ation multim�dia et le droit. Paris : Litec (DroitaLitec), 2000, 206 p.

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